L’acteur Samuel Le Bihan était à l’affiche de l’unitaire pour France 2 Tu ne tueras point le 3 avril 2024 à 21h10. Il est également le co-fondateur d’Autisme Info Service, et la journée mondiale de l’autisme a eu lieu cette année le 02 avril, jour où il a reçu la légion d’honneur.
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On voulait mettre en exergue le sujet du Téléfilm « Tu ne tueras point », diffusé le 03 avril sur France 2, où vous interprétez Simon Marchand, avocat pénaliste, qui a défendu une femme accusée du meurtre de sa fille Clara, autiste et polyhandicapée, qu’elle imagine souffrir de son autisme dans une société validiste. Est-ce que les retombées étaient au rendez-vous ?
Samuel Le Bihan
Je m’attendais à plus de discussions autour du film et qu’il permettrait un peu plus de sujets d’échange ? Finalement, pas tant que ça, en vérité. C’était quand même la Journée mondiale de l’autisme. Il y a eu quand même un débat derrière, beaucoup de réactions de spectateurs, de familles parce que c’est un sujet particulier et rare. C’est le cas extrême d’un enfant terriblement handicapé, d’une mère complètement abandonnée par son environnement, par son entourage et par la société. Et, donc on pose la question de la responsabilité, et sans amener la réponse. On ouvre le débat, c’est la question qui est importante, comme ce sont des choses qui arrivent, qui existent, alors ça mérite qu’on évoque cette situation dans un film. La justice, elle n’est pas seulement là pour condamner ou innocenter, elle est également là pour réfléchir sur un sujet, pour en parler, pour l’évoquer.
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Vous souhaitiez éveiller les consciences et valoriser ce sujet ?
Samuel Le Bihan
Oui, c’est ce que je voulais provoquer avec ce téléfilm. Au début, il y a eu une petite levée de boucliers car on considérait qu’on faisait de l’eugénisme. Alors que ce n’est pas du tout le sujet, mais vraiment pas. Ce qui était important, c’était d’élever la discussion, de faire ce film qui a le mérite d’exister et qui a quand même été vu par le public. J’ai d’ailleurs eu plus de réactions du grand public qui l’a reçu en se disant « Waouh », ce sont des choses qui arrivent et il faut se poser des questions, que des professionnels du monde de l’autisme.
C’est vrai, dans votre quotidien, vous aspirez à avoir une vie heureuse, équilibrée, et tout d’un coup, un élément, un accident en quelque sorte, vient tout perturber et va modifier votre comportement. Vous allez vous transformer en guerrier ou en lâche, vous allez fuir, vous allez affronter, vous allez vous perfectionner, vous allez voir à quel point tout à coup vous vous rendez compte que vous êtes extrêmement fort ou faible. C’est de ça aussi dont je voulais parler, la rencontre avec l’handicap c’est quelque chose qui bouleverse votre quotidien et vous modifie profondément.
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À ce titre, vous avez reçu la Légion d’honneur.
Samuel Le Bihan
Oui, ça résumait un peu mon combat dans le monde de l’autisme. Donc, je crois que ça récompense mon engagement associatif. Et ça se résume à cette plateforme que j’ai créée avec Florent Chapelle, un autre papa, qui est un outil pour les autistes, les gens qui accompagnent les autistes, les structures, etc.
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La plateforme se nomme « Autisme Info service ».
Samuel Le Bihan
Tout à fait. C’est une plateforme où on fait du suivi de dossier. On peut répondre à des questions administratives, juridiques, médicales, psychologiques. C’est de l’écoute aussi, et on est en train de constituer un annuaire de tout ce qui concerne l’autisme en France.
Donc voilà, ce sont des choses qui n’existaient pas, dont on avait besoin et c’est une façon de reconnecter toutes ces associations qui ont été créées par les parents parce que ça fait 30 ans que ce sont les parents qui font avancer la France. On a rendu service à tellement de gens, plus 40 000 personnes.
Et du coup, l’État a repris ce service à 100% et donc, c’est devenu un service public qui reste quand même une association reconnue par l’État pour son efficacité et qui va s’inscrire dans le temps. La Légion d’honneur c’était une façon de reconnaître qu’on avait fait un bon boulot, c’est une distinction qu’on vous donne quand vous avez apporté quelque chose à votre pays.
Donc, c’est extrêmement émouvant pour soi de se dire que j’ai apporté quelque chose à ma nation, ça me remplit de fierté.
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Selon vous, le rôle d’un artiste c’est de révéler des choses et être un messager de sujets importants ?
Samuel Le Bihan
Moi je me dis que les artistes sont un peu ce que les rêves sont au cerveau. Vous savez que la nuit on fait des rêves parce que notre cerveau est en train de ranger les événements dans les emplacements qu’ils doivent prendre pour pouvoir survivre, sinon il y aurait trop d’informations et on deviendrait fou.
Donc les rêves servent à ça. Et bien, je pense que les artistes c’est la même chose, c’est à dire, autant on va vous faire des trucs farfelus, incompréhensibles, très bizarres, mais en réalité on est là pour, d’une façon très ressentie, aider à organiser inconsciemment la société. Sinon, la société deviendrait folle si on était uniquement sur de l’objectivité, on en mourrait parce qu’à travers le ressenti des artistes, il y a de l’amour. Et on a besoin de cette émotion en relation avec le beau, avec la grâce, c’est essentiel. Donc, on a un rôle qui est supposé être superficiel comme peut l’être un rêve dans la nuit, mais en vérité, il est essentiel à la santé mentale.
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En octobre 2024, ce sera la diffusion du téléfilm « Seul » par Pierre Isoard et Julien Guérif où vous êtes accompagné par Anne Suarez et Clément Bresson. Ce biopic est inspiré de la véritable histoire du tour du monde en solitaire par le navigateur Yves Parlier. Il prend le large en novembre 2000 en participant au Vendée Globe. Seul au milieu de l’océan, sans escale ni assistance, alors qu’il s’élance pour la course de sa vie, après avoir cassé son mât dans le Pacifique, Yves Parlier est loin de se douter que c’est d’une toute autre aventure dont il sera le héros : Une incroyable épreuve d’endurance et de survie.
Dans ce téléfilm qui retrace cette expérience vous avez mis beaucoup de vous, à la fois d’une façon morale et à la fois physique. Est ce que ce n’est pas un téléfilm qui synthétise l’homme que vous êtes, quelqu’un qui est capable à la fois de se battre, qui a une grande force morale, qui prend des sujets à bras le corps dans la vie, qui se prend aussi des vagues ? Est ce que ce téléfilm ne vous symbolise pas un peu ?
Samuel Le Bihan
Alors, je dirais que c’est un fantasme de courage, parce que c’est tellement extrême. Oui, donc ce serait moi avec une sorte d’image que j’aimerais avoir. De l’engagement que j’aimerais avoir, de la parole que j’aimerais tenir. Il y a ça sur un masque, enfin un masque extrêmement héroïque. Oui, ce sont des valeurs qui me touchent, que moi je mets au plus haut, le courage et l’engagement.
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Dans quelles conditions vous avez fait le tournage du téléfilm « Seul » ?
Samuel Le Bihan
C’était assez fou parce qu’on a eu un budget télé, c’est moins qu’un qu’un film de cinéma. Même un petit budget de cinéma, on va dire, ça démarre à 3 000 000. Avec toutes les aides possibles qu’on a pu trouver, plus le budget de la chaîne, on arrive à 2 000 000. Il faut des bateaux suiveurs, tout un tas de logistique pour la prise de vue, ça demande beaucoup plus de moyens et nous on l’a fait pour rien parce qu’on est parti avec une équipe réduite.
Donc l’idée c’était de tourner plus de jours, avec une petite équipe. Mais là où le producteur était fort, c’est qu’il a trouvé un bateau de course et c’est quand même le budget le plus gros du film. Il a trouvé un deal de communication où le film s’est placé un peu comme un sponsor puisque c’est le bateau sur lequel on a tourné qui va faire le Vendée Globe.
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Et sur la même course d’Yves Parlier !
Samuel Le Bihan
Tout à fait. C’est ce qui permet d’être cohérent, là au moins, on avait un vrai bateau qui fait le Vendée Globe, qui part faire le tour du monde et qui est préparé pour ça. Et donc on était dans les meilleures conditions qu’on puisse rêver. Ensuite, comme on avait pas de bateau suiveur, il n’y avait pas de moment de repos, on était dans en micro équipe sur ce bateau à tout faire, pas de maquilleuse, pas de coiffeuse, pas d’habilleuse. Enfin voilà, on s’est dit, on part et on se débrouille !
Et comme il y a une évolution dans le personnage, il y a des changements de costumes. Alors c’est vrai qu’à terre on me donnait exactement mes affaires pour la journée, on me disait voilà, telle scène, tu dois faire ça. C’était très rigoureux. On partait en fonction des marées, de la météo. On tournait dans des conditions où le bateau bougeait, il était complètement instable. C’était un bateau pour 2 personnes maximum normalement, donc rien pour le confort. Mais la complication était que je devais perdre 10 kilos dans le temps durant la durée de tournage. C’était vraiment des bouts de ficelle, mais en même temps, c’était intense car on était toujours dans une vérité, on ne trichait pas. Moi j’étais épuisé parce que je maigrissais à vue d’oeil, je ne mangeais pas.
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Le tournage a duré combien de temps ?
Samuel Le Bihan
Un mois et demi. On était tout le temps en mouvement, fallait s’adapter. Non, c’était dingue, mais de réussir à faire ça dans le temps imparti, avec le budget qu’on avait, c’est complètement dingue. On était 10 et en fait c’est comme si on faisait un court métrage de fin d’étude, dans des conditions minimales, mais avec un investissement maximum, mais de tout le monde.
Il y a une journée, j’étais malade quoi, on tournait une scène dans la cabine et je devais rester, j’en pouvais plus, je sortais vomir, je revenais, on tournait, je sortais vomir et j’ai passé. J’ai passé ma journée à vomir quoi, et j’étais épuisé. Le lendemain, je suis arrivé sur le le bateau, j’étais encore malade. C’est le tournage le plus éprouvant que j’ai fait, mais c’est pas ça qui fait un bon film. C’est parce qu’on est passionné, on y a mis tout notre cœur. Donc on a ramené un objet très atypique pour la télé, mais en même temps très dense, très vrai, très dépouillé, très sincère, avec beaucoup d’émotions. Une vérité, quelque part dans ce monde entouré de virtuel, je pense que les gens ont besoin peut être de cette sincérité.
Nous on on fait ce métier pour ça. Évidemment on fabrique des histoires, c’est pour distraire les gens, mais dans cette distraction, on y met des messages profonds. Par exemple, pour mon rôle d’Alex Hugo, ça parle d’environnement, ça parle de justice, ça parle de solidarité, ça parle d’écoute, pour ressentir les choses pour lesquelles on n’a plus le temps. Et Alex Hugo, c’est un rythme lent, c’est l’inverse, on est arrivé à contresens de la mode qui était « des montages rapides sur des formats courts de 56 Min ». Là on faisait 01h30, c’est très contemplatif. Un rythme posé où on prend le temps de l’écoute et du ressenti et c’est un rythme humain.
Et là on propose une histoire qui a la même puissance avec la mer. Donc on retrouve les éléments, on retrouve le moment où l’homme sur son bateau n’a plus rien et il est obligé de revenir à la base de la vie. Alors évidemment, ça parle de courage, ça parle de détermination, ça parle d’engagement, mais ce sont des vraies valeurs.
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Vous incarnez souvent des rôles liés à une quête de vérité, une certaine vérité humaine ?
Samuel Le Bihan
Oui effectivement, dans le fond, oui.
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Le téléfilm « Seul » sera diffusé quand ?
Samuel Le Bihan
Le 10 novembre, aux alentours du départ du Vendée Globe, donc on sera en accord avec l’actualité.
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« Carpe diem » c’est une mini série pour TF1 où vous avez tourné entre autre avec Barbara Schultz et Jisca Kalvanda. Vous incarnez à nouveau un avocat mais peu singulier, Tom Villeneuve, accusé à tort du meurtre de sa femme et qui a passé 17 ans en prison où il a étudié le droit. À sa libération, il devient avocat à Nice et il est décidé à découvrir qui est le véritable meurtrier de sa femme. Il ouvre son cabinet pour défendre ceux qu’il croit injustement accusés de crime, comme lui. Son style est toujours souriant et décontracté avec un certain panache. Il n’a qu’une règle dans l’existence : Carpe Diem. Profiter de l’instant présent. Vous aimez cette série ?
Samuel Le Bihan
J’adore Carpe diem ! On s’est donné du mal et je crois que c’est assez sympa. C’est une série de 6 épisodes diffusées sur 3 soirées. C’est très drôle, il y a des super acteurs, c’est vraiment très chouette, et c’est une proposition très différente de tout ce que on a l’habitude de me voir faire. Alex Hugo c’est le héros, un peu taciturne, seul, alors là pour le coup Carpe diem, c’est un peu de comédie, un peu d’action, très très sympa. Il y a aussi une quête personnelle. Il y a toujours un lien avec la paternité, la liberté, la vérité et le courage aussi, bien sûr.
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Vous auriez pu devenir avocat ?
Samuel Le Bihan
Oui, c’est un métier que je trouve assez passionnant et qui n’est pas loin des acteurs en vérité. Un avocat qui se bat sur la peine de mort, sur l’IVG sur des causes qui changent le monde. C’est un métier que je trouve passionnant pour ça.
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Vous avez tourné la série à Nice et j’avais fait un commentaire sur Instagram en vous voyant faire des cascades durant le tournage, où j’avais écrit que vous étiez le nouveau « Bébel » de la Côte d’Azur !
Samuel Le Bihan
Oui ! C’est drôle, mais c’est pas faux. C’est à dire que quand je me suspends sur la façade du NEGRESCO, c’est un clin d’œil plein d’amour à Belmondo. Il mettait toujours de l’humour dans des scènes extrêmement périlleuses et c’est un peu ça qu’on s’est amusé à faire. Il y a un peu de cette énergie là, de « l’homme de Rio ».
Ce qui est marrant dans le jeu, c’est le fait d’avoir énormément de ruptures et c’est ça la comédie. Et, la personne, l’actrice, qui m’a le plus inspiré pour travailler ça, c’est Catherine Deneuve. Elle a une façon de jouer la rupture qui est complètement dingue, quand on la voit dans les films de Rappeneau, dans « le sauvage », dans les comédies. Elle est toute en rupture, c’est fabuleux, elle maîtrise l’humour et c’est prodigieux. Bébel, il maîtrisait super bien les ruptures aussi, il était très très fort là-dessus. Pour moi, c’est du théâtre pur et j’adore ça !
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Est ce qu’il y a des rôles où vous aimeriez incarner des personnages totalement opposés à vous ?
Samuel Le Bihan
Non, c’est marrant, mais pourquoi ne pas explorer ? J’ai l’impression que ça ne me va pas. J’ai joué des mecs antipathiques en me disant que l’on allait reconnaître un travail d’acteur et en fait on n’a rien reconnu du tout. Et ma réflexion ça a été finalement que je ne peux pas tout jouer, tout ne me va pas et je suis obligé d’avoir un lien personnel avec le rôle que j’interprète. J’essaie d’être un peu cohérent avec qui je suis et les valeurs que je défends.
Merci à Samuel Le Bihan pour cet échange intéressant sur des sujets importants.
INTERVIEW par Alexandre Joulia-Helou, rédacteur en chef-adjoint AMILCAR MAGAZINE GROUP & THE RIGHT NUMBER MAGAZINE.
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